Vie de Parent

Mon accouchement physiologique

Quand j’étais enceinte, je n’avais aucune attente particulière concernant mon accouchement. Lorsque ma sage femme m’a demandé si j’avais un plan de naissance, j’ai répondu « je veux juste qu’il sorte et que l’on aille bien tous les deux ». Je n’avais pas d’avis arrêté. Même si j’avais l’impression que l’on attendait de moi que je parte sur un accouchement physiologique, je préférais lâcher prise et voir comment les choses viendraient.

Quelques semaines avant mon accouchement. Une copine m’a prêté le livre « J’accouche bientôt, que faire de la douleur ? » de Maïtie Trélaun. Ce livre, dont je vous avez parlé dans un post sur mes lectures de grossesse, a été un tournant. Grâce à lui, j’ai envisagé l’accouchement physiologique comme une chose tout à fait possible même pour un premier enfant. J’irais même plus loin en disant qu’après cette lecture, je m’en sentais capable (tout en restant ouverte à l’éventualité de demander une péridurale et que c’était ok aussi).

La rupture de la poche des eaux

Dans la nuit de dimanche à lundi, je n’arrivais pas à trouver le sommeil. J’avais pas mal de remontées acides alors j’ai préféré rester éveillée devant un film en attendant que ça passe (Moxie sur Netflix, je vous le recommande). Je faisais des allers-retours aux toilettes car j’avais tout le temps envie d’uriner. A un moment, j’ai senti que j’étais mouillée. J’ai râlé « je me suis encore pissée dessus » (une autre joie que j’ai découvert lors de mon troisième trimestre) puis je me suis rendue compte que ma protection hygiénique était trempée mais surtout rose pâle. Mon terme était prévu dans trois semaines. Je fixais ma serviette en me disant « c’est pas possible, mais si j’ai fissuré la poche des eaux, mais non c’est pas possible, mais si c’est ça ». Quand j’ai compris que c’était bien ça, je suis restée calme. J’ai pris une douche, choisie une tenue confortable, pris les affaires pour la maternité (que j’avais terminé la veille en plus… coïncidence ?) et j’ai appelé Pierre qui était de garde.

Il est arrivé tout de suite. Il était tout excité. Moi j’étais entrain de mettre la maison en ordre et de préparer les affaires de notre chien Perth pour que ma belle mère vienne le récupérer. Puis nous sommes partis. J’avais fissuré la poche des eaux à minuit et demi. A une heure et demi nous sommes arrivés à la maternité de la clinique Saint Jean.

L’arrivée à la maternité

J’avais pris des affaires de rechange pour Pierre car je me doutais que cela allait être long. C’est un premier bébé, j’avais juste fissuré la poche des eaux et je n’avais pas de contractions, juste quelques légères douleurs comme si j’allais avoir mes règles. J’étais préparée à ce que cela soit très long. Nous avons été accueillis par Marie, la sage femme de garde qui nous a tout de suite mis dans une salle de pré travail. Marie m’a mise sous monitoring et m’a examiné. « Vous ne vous êtes pas trompée, vous avez bien fissuré la poche des eaux et vous êtes dilatée à 2 ». Elle m’a ensuite demandé si je souhaitais avoir une péridurale. J’ai timidement répondu que si j’arrive à gérer la douleur, j’aimerais essayer sans. 

Je suis restée une heure sous monitoring. Pierre était à mes côtés et me donnait de l’homéopathie toutes les demi heures tout en remplissant les papiers. « On lui met quoi comme 2e et 3e prénoms ? ». Échange de regard, on n’avait pas encore pris le temps d’y réfléchir. Ça tombait bien du temps on en avait. Enfin c’est ce que je croyais.

« Essayez de dormir et on verra demain matin »

Puis comme je n’avais pas plus mal que ça, on nous a installé en chambre. La sage femme me dit que si ça reste comme cela, j’essaie de dormir le plus possible et je reviendrais au bloc obstétrique après le petit déjeuner. Si par contre les contractions s’intensifient, je n’attends pas.

J’ai pris une douche chaude et je me suis couchée. J’ai du dormir 20 minutes quand une première contraction m’a réveillé. Je me concentre sur la respiration que m’a apprise ma sage femme (qui se rapproche énormément de celle que je pratique dans mes cours de Hatha Yoga). Ça s’intensifie. Je prends mes écouteurs et enchaîne les séances de sophrologie de l’application Insight Timer. Dès que je sens la vague arriver, je me concentre sur ma respiration tout en visualisant un endroit calme.

C’est de plus en plus fort et je n’arrive plus à rester allongée. Je vais dans la salle de bain et j’alterne position assise sur les toilettes, debout en me balançant doucement, accroupie en me tenant au lavabo. Lors des contractions, je ne visualise plus un endroit calme mais le col de mon utérus entrain de s’ouvrir. Je me répète dans ma tête « je m’ouvre pour laisser passer mon bébé ».

Cela devient difficile. Les contractions se rapprochent toutes les deux minutes et j’ai du mal à souffler. Il doit être 4 heures du matin, quand je sors de la salle de bain en disant à Pierre « on retourne au bloc, je n’en peux plus, je veux la péridurale ».

La salle de pré travail

Marie me conduit en salle de pré travail et m’examine. Je lui dit que j’ai trop mal et que je veux la péridurale. Je suis dilatée à 6. Elle veut m’accompagner dans mon désir d’accouchement physiologique alors elle me propose de prendre un bain pour me détendre. Tout en me rassurant que si vraiment c’est trop douloureux, on appellera l’anesthésiste pour la péridurale. 

L’eau chaude me fait du bien, je me détends. Je masse mes poignets et mon plexus solaire avec l’huile « Accouchement harmonieux » de Pranarom que m’avait donné une copine (la même qui m’avait prêté le livre de Maïtie). Pierre me masse le bas du dos avec l’huile jusqu’à ce que je sois immergée jusqu’à la poitrine. Les contractions sont toujours très régulières mais l’eau, l’ambiance tamisée et la présence tendre de Pierre les rendent plus supportables… pendant un temps.

Des vagues de douleurs incontrôlables arrivent. Mon mental s’efface, mon instinct prend le relais. Tout devient animal. Je m’accroupie dans la baignoire et m’agrippe aux poignets, je râle, je crie, je hurle. Je me répète dans ma tête « je m’ouvre, pour laisser passer mon bébé ».

La douleur est si intense que parfois ma respiration se bloque. Pierre est là, il me tient les mains, m’embrasse la nuque, me dit qu’il m’aime et surtout m’encourage à bien respirer. Je hoquète « appelle la sage femme, je veux la péridurale ».

« Maintenant il faut pousser Pauline »

Marie arrive, me demande de nouveau si elle peut m’ausculter et m’annonce qu’il n’y aura pas de péridurale car je suis à dilatation complète. Elle me dit qu’elle s’en doutait et qu’elle avait déjà préparé le fauteuil roulant. Entre deux contractions, je sors de la baignoire et je m’assoie sur le fauteuil. Marie me couvre d’un drap et nous courrons tous les trois (enfin moi je roule) en salle de travail.

On m’aide à monter sur la table d’accouchement et à m’allonger sur le dos. Moi qui appréhendais un peu cette position standard, la trouvant peu naturelle, je me sens « bien » dedans alors je ne cherche pas à changer. Je crois que de toute façon j’ai tellement envie de pousser que j’aurais pu le faire en arbre droit !

Tout est devenu encore plus flou et rapide. Mon corps n’était que douleur. Je ne voyais plus rien. C’est à peine si j’entendais les mots de l’équipe médicale et les encouragements de Pierre. J’ai poussé de toutes mes forces en me répétant que j’étais puissante, forte, capable et que l’on formait une super équipe avec bébé car lui aussi fait un taff de folie pour venir au monde.

Je sens la tête, c’est horrible comme ça me brûle. Marie me propose de toucher les cheveux mais je n’arrive pas à bouger et je préfère rester focus. Je pousse de nouveau très fort. Une ou deux fois, je ne sais plus et d’un coup j’entends « stop, stop il est là ».

La naissance de Raphaël

J’ouvre les yeux et je vois Marie le tenir dans ses mains et le poser sur mon ventre. Il est tout fin, il pleure et à la tête en fusée. Je reconnais son adorable petit nez en patate que nous avions vu à l’échographie. Pierre me dit a l’oreille « grâce à toi, nous sommes parents ma chérie ».

Raphaël pleure, Pierre pleure et je crois que je pleure aussi. Plus rien n’existe à part nous. 

On me signale que l’on va faire les premiers soins à bébé pendant que j’expulse le placenta. Je demande à Pierre de rester près de notre enfant.

J’ai peur que ce soit encore long et douloureux, je n’ai plus de force. Finalement je n’ai qu’à pousser tout doucement et le placenta sort quasiment seul avec l’aide de la sage femme. Elle l’examine sous toutes les coutures. Il est intact. Ouf, pas besoin de révision utérine !

Elle me dit ensuite que je vais avoir besoin de quelques points car je me suis déchirée naturellement. Elle me rassure en me disant que c’est vraiment peu. Je lui dit d’accord et lui demande si j’ai fait caca en poussant (celle là de préoccupation). Elle rit et me répond que non.

Après les soins, l’équipe installe Raphaël sur Pierre en peau à peau. Ils sont sur ma gauche. Je n’ai qu’à tourner la tête pour les voir.

Des points de suture

Le gynécologue arrive. J’aime un peu moins son entrée. Il est moins doux et bienveillant que les trois personnes qui m’ont aidé à accoucher. Il n’est pas autant dans le consentement que les autres qui me demandaient avant chaque acte. Alors je lui pose un tas de questions pour me rassurer. Malgré l’anesthésie locale, j’ai mal quand on me recoud.

Je l’indique au gynécologue qui s’excuse et me dit que c’est normal. Je ne suis pas convaincue que ce soit « normal d’avoir mal » avec une anesthésie locale mais après ce que je viens de vivre, je serre les dents. Maintenant que c’est passé et que lors de sa première visite à domicile, ma sage femme m’a dit « qu’il avait fait un travail d’orfèvre et qu’on ne verrait plus rien » tout est pardonné.

Marie m’informe qu’elle va devoir m’appuyer sur le ventre pour vérifier la tonicité de l’utérus et faire sortir un maximum de sang et de caillots. Elle me prévient que cela risque d’être douloureux. Effectivement ça me fait un mal de chien !

On me le fait une dizaine de fois. C’était peut être moins mais j’ai eu l’impression que cela ne s’arrêtait pas. Je sentais le sang qui s’évacuait en grande quantité. Au bout d’un moment j’ai lâché en riant nerveusement « j’ai l’impression que vous me videz comme une dinde ».

C’est bon, c’est fini et Marie me nettoie. Le froid sur mon intimité me fait un bien fou même si clairement j’ai envie qu’on laisse cette partie de mon corps tranquille.

Le moment que je n’oublierais jamais

C’est le moment tant attendu : celui du peau à peau avec mon bébé et de la tétée de bienvenue.

On me le pose doucement sur le torse. Il a les yeux grands ouverts, gigote et cherche mes seins. Je demande si je peux allaiter, on me dit d’attendre un peu. Cela me semble absurde mais je choisi de faire confiance. Je ne sais pas combien de temps cela a duré. Peut être quelques minutes mais moi cela m’a paru une éternité de le voir gesticuler la bouche en cul de poule.

« Babou », l’auxiliaire puéricultrice me propose enfin de m’aider à le mettre au sein. J’accepte avec joie et grâce à ses précieux conseils. Bébé se met à téter goulûment. Il me pince fort l’asticot ! Je n’en ai rien à faire. A ce moment là, je me sens tellement heureuse avec mon fils sur moi et mon chéri qui nous enveloppe de ses bras et de son amour. Le temps est suspendu.

L’équipe médicale me félicite en se retirant doucement. Je les remercie d’avoir été si bienveillante et encourageante.

Nous restons là ainsi juste tous les trois à enfin savourer ce moment de paix après le tsunami qui vient de se passer.

En tout, il s’est écoulé cinq heures entre la fissure de la poche des eaux à la maison et la naissance de Raphaël. Le tout sans péridurale ni épisiotomie. Je n’en reviens toujours pas d’avoir vécu un tel accouchement surtout pour un premier bébé. Peut être était il pressé de nous rencontrer. Nous qui l’attendions depuis si longtemps.

Je suis fière de mon corps et je regarde mon petit ventre tout mou, ma culotte filet, ma cellulite et mes kilos en trop avec douceur et bienveillance. Comme si l’expérience de la grossesse m’avait appris à lui foutre la paix et la maternité a enfin l’aimer.

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2 Comments

  • Reply
    Notre aventure lactée - L'ananas blonde
    6 janvier 2022 at 20 08 37 01371

    […] eu la chance de vivre l’accouchement physiologique que j’espérais secrètement sans trop y croire. Raphaël est né en cinq heures au petit matin du lundi 8 mars […]

  • Reply
    Claire Bossuet
    3 juin 2021 at 23 11 48 06486

    J’ai adoré te lire, j’étais avec toi les larmes aux yeux lors de l’arrivée de ton trésor ! Merci pour ce beau partage ! Bienvenue Raphaël dans ce monde qui grâce à toi réapprends l’essentiel.

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